Les légendes, les contes et les traditions appartiennent au patrimoine ethnologique. Ils sont souvent révélateurs de la vie sociale d’un territoire. Par exemple le conte qui suit « Le curé, le maître d’école et le cochon ». Dans les villages, longtemps les autorités morales ont été incarnées par le curé et l’instituteur. Souvent on a eu tendance à opposer ces personnages, à conter leurs rivalités. Mais astucieusement les auteurs ont su ménager une sorte d’équilibre dans la présentation de l’un et de l’autre, satisfaisant ainsi la diversité des lecteurs. Selon la philosophie de l’auteur du conte, chacun de ces deux personnages a été présenté de manière plus ou moins flatteuse. Ici l’instituteur est un voleur mais il est rusé. Le curé est prévoyant, gourmand, charitable mais naïf. Là encore, l’auteur a su ménager l’un et l’autre.
La viande de cochon conservée au saloir a longtemps constitué avec le pain (1kg par jour et par personne) les pommes de terre et les volailles, l’alimentation de base d’une famille populaire. « La mort à cochon » donnait lieu à une journée laborieuse mais aussi festive. On faisait appel à un tueur mais aussi à un saleur. Ce dernier mettait en couches les morceaux de viande préalablement préparés avant de les saupoudrer de poivre, d’épices et de les rouler dans du sel gris. Un mois et demi après on dessalait le cochon et on pendait jambons et quartiers de lard dans la cuisine. Quelques semaines après, la viande était séchée et on la replaçait dans le saloir mais simplement sur un lit de paille. « La mort du cochon » maintenait vivant un réseau social car le partage était de rigueur avec les voisins et amis.
Un conte connaissait plusieurs versions adaptées aux lieux où on le racontait.
Le curé, le maître d’école et le cochon.
Il y avait une fois à Tagnon un curé qui, pour sa provision d’hiver, gardait un cochon dépecé et salé. Il en avait tiré aussi d’excellents boudins, et chaque fois qu’il visitait ces appétissantes provisions, il se frottait les mains, se réjouissait, disant : "Certes non, je ne mourrai pas de faim cet hiver". Puis, comme il était charitable, il ajoutait : « D’ailleurs les pauvres en auront leur part. »
Mais il avait compté sans son grand ami le maître d’école, qui, tous les jours, le venait voir et lui volait, dès qu’il tournait le dos, soit une grillade, soit de la graisse, soit un boudin.
Le curé, cependant, finit par s’apercevoir que ses provisions diminuaient à vue d’œil, si bien qu’il dit au maître d’école :
- Maître d’école, on me vole mon cochon, si jamais je tiens le voleur !...
- Curé, c’est vrai, on vous vole votre cochon, répondit le maître d’école, si jamais vous tenez votre voleur !...
Cette menace lui ayant suscité quelques sages réflexions, il craignit d’être découvert s’il continuait plus longtemps ce manège. Le rusé maître d’école imagina donc, un jour, de prendre un pot de graisse et d’en barbouiller la bouche de tous les saints de plâtre qui ornaient l’église, et, tout joyeux de son stratagème, il « s’emmène » chez le curé.
- Curé ! curé ! j’ai trouvé les voleurs, venez voir !
Dare-dare ils courent à l’église et le maître d’école montrant alors tous ces saints dont les figures reluisaient de graisse :
- Les voilà, dit-il, ceux qui mangent votre cochon !
- C’est ma foi vrai ! s’écria le curé tout stupéfait ; mais voyez donc ce grand goinfre de saint Pierre qui devrait donner le bon exemple aux autres, il en a la bouche toute pleine ! Coquins, voleurs ! Vous allez me le payer !
Et s’armant alors d’un gros bâton, il tapa si bien et si fort sur l’échine de tous ces saints de plâtre qu’en un rien de temps il les mit tous en miettes.
Depuis ce jour on ne vola plus de cochon à M. le Curé puisqu’il n’y avait plus de saints pour le manger, mais jamais il ne se douta de ce mauvais tour que lui avait joué son ami, le rusé maître d’école.
La version de Pauvres
Le maître d’école vole des morceaux de lard dans le saloir et quand il est vide il va chercher tous les saints de pierre qui sont dans l’église, les réunit en rond autour du saloir, leur met à chacun une fourchette à la main, appelle le curé et lui dit : « Curé, voici vos voleurs ». Le curé indigné se saisit d’un bâton et réduit en miettes tous les saints.
Nos églises recèlent une multitude de statues de saints en plâtre, en bois, en pierre. Ils sont identifiables par des attributs que l’iconologie a depuis longtemps codifié. En voici une première galerie.
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Saint Fiacre - Buzancy | Saint Laurent - Verpel | Saint Marcel - Condé-les-Autry | Saint Quirin - Marcq |
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Saint Juvin - Saint-Juvin | Saint Roch - Senuc | Saint Walfroy - Autruche |
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Saint André - Briquenay | Saint Eloi - Condé-les-Autry |
Saint Expédit - Autruche |